Résumé (presque) court : Ils se sont rencontrés au lycée, ou plutôt fréquentaient le même sans vraiment se connaître jusqu’à ce que le mec de Juna de l’époque ne vienne s’approvisionner en coke auprès de Melo. Tyrannique et violent avec elle, à force de le voir lui coller des tartes chaque fois qu’elle l’accompagnait lorsque cet empafé venait lui cherchait sa dose, un jour pas fait comme un autre, Melo l’a sorti de sa caisse et lui a mis une trempe sur le bitume de sa rue. Une semaine plus tard, il s’assurait que le message était bien passé et lui mettait une deuxième raclée cette fois-ci au lycée pour lui faire comprendre que Juna était désormais à lui. Au début leur relation était surtout basée sur le sexe et ils ne partageaient vraiment en commun de leurs deux mondes, leurs deux cultures bien distincts jusqu’à ce que des sentiments ne viennent s’en mêler. Et inévitablement avec ça, les choses ont commencés à se compliquer lorsque leurs trajectoires se sont opposées à l’heure de la majorité. Viré du bahut, il fait une croix sur une bourse universitaire qui lui était promise pour ses performances athlétiques dans l’équipe de football et s’ancre un peu plus profondément dans la rue alors qu’elle est diplômée avec mention et acceptée à UCLA. Ces perspectives les déchirent depuis avec la jalousie quasi-maladive dont elle fait preuve, Juna essayant de le tirer hors du « jeu » et de la rue pour construire un univers plus sain alors qu’il gravit les échelons du trafic et ne se voit aucune autre issue que l’argent sale. Les cadeaux dont il la couvre et la tendre complicité qui jaillit toujours de leurs moments ne changent rien à ce problème de fond. Aujourd’hui si tout tend à les séparer et si leurs journées se passent de façon diamétralement différentes, lorsqu’elle étudie à l’université pendant qu’il campe au coin d’une rue à faire bosser son équipe de deal ou à défourailler sur des rivaux, la profonde attache qui les lient semble plus forte que tout et rien n’est vraiment assez fort pour les empêcher de se retrouver le soir. S’ils vivent dans le conflit et passent leur temps à se disputer puis à se réconcilier, ils s'étreignent aussi fort qu'ils ne hurlent dessus, se kiffent au fond aussi fort qu’ils ne se chamaillent. En tout cas assez pour se refuser à choisir la facilité qui serait de suivre chacun de leur côté leur propre chemin. Malgré ses traits durs, parfois indifférents, sa grosse fierté qu’il peine à mettre de côté et l’impression qu’il reste sourd à ses idéaux, il la considère comme la femme de sa vie et s’interroge sur la possibilité d’une autre vie pour lui, et donc pour eux.
Je te l'ai dis bébé, un jour j'aurais mon royaume... Et j'ai déjà ma reine.
Longue et chaude journée de boulot. 35 degré à l’ombre du parasol sous lequel il s’est posé toute l’après-midi pour diriger les manœuvres de son équipe de deal et une température de plomb – et de barbecue – qui n’a pourtant pas arrêté ces connards de junkies de se pointer pour remplir les caisses. Contraste extrême et saisissant avec le froid antarctique qui règne déjà lorsqu’il passe ce soir la porte de l’appartement et rentre chez lui. Juna est là, même si l’accueil fantôme qui lui est offert au moment de refermer derrière lui ne se mêle pas aux indices de lumières et de sons de télévision en fond qui le lui laisse deviner.
« Bébé, c’est moi, je suis rentré. » Pas de réponse… Deux solutions : Soit elle est au fond de son bain et ne l’a pas entendu, soit elle fait la gueule. Ses 21 appels qu’il a laissé manqués sur son mobile et sa posture sur le canapé du salon lui font vite comprendre qu’il s’agit bien de la deuxième… Le regard et les traits durs, figés sur le magazine qu’elle feuillette comme s’il n’était pas là le lui confirme. Il le sent, il le sait… Il va encore avoir le droit à des reproches. Le temps de jeter ses clefs de bagnole sur la table, tirer le glock de sa ceinture sous le t-shirt qui le dissimule et le poser à côté, il s’approche avec prudence en pinçant un sourire entre ses lèvres qui se veut déjà apaisant.
« "Hey Melo chéri, moi aussi je suis contente de te voir, tu m’as manqué tu sais... T’as passé une bonne journée ?" » mime-t-il avec la dérision d’une voix soprano pour essayer de détendre la lourde atmosphère qui écrase ses yeux sur ce foutu magazine de gonzesse. Son sourire s’estompe puis s’efface au moment où il s’assoit à côté d’elle, le regard tourné sur ces airs indifférents et les mains jointes devant lui.
« Je sais déjà que ta journée à du être passionnante puisque t’as pas eu deux minutes pour m’appeler ou même me répondre. » lui jette-t-elle froidement. Il soupire, se frotte la tête avant de se laisser basculer sur le dossier. Ces mêmes prises de têtes, ces mêmes débats le fatiguent plus que dix heures passées dans la rue. Il étend son bras le long du dossier derrière elle, pose une main sur sa cuisse et se rapproche.
« Bébé arrête, j’ai pas envie de me prendre la tête ce soir.... » Juste une fois… Cette fois, alors qu’il n’a aucun petit cadeau à lui offrir qui pourrait aider à détendre les choses et ne peut compter que sur ses mots. Loin d’être son meilleur atout. Il a toujours eu du mal à exprimer ce qu’il ressent.
« Et moi j’ai pas envie d’être prise pour une conne. » Et ce genre de trucs ne l’aide pas… Au moins, elle a sèchement refermé son putain de magazine et le regarde enfin.
« Faut que j’ai un bipeur moi aussi pour te joindre? Ca c’est sûr, tu mets pas longtemps à les rappeler tes gars lorsqu’ils te bipent et que ce satané bidule me réveille en plein milieu de la nuit alors que j’ai des cours le lendemain. » Rien à voir… S’ils le bipent, c’est qu’il y a une merde quelque part dans le business ou une embrouille sur son secteur. Ses appels à elle n’ont rien d’urgences.
« Hey ça veut dire quoi ça ? Tu crois que je bosse pas toute la journée ?! » réplique-t-il, piqué à vif par une allusion qui ne lui plait pas.
« Ohw oui tu bosses... Trouves toi un vrai boulot ! » Ok, ça le gave… Plus ça va, et plus ça monte. Plus elle s’énerve toute seule et plus le clash est inévitable.
« Un vrai boulot ? C’est quoi un vrai boulot ? Un truc qui me prendrait deux ans à gagner ce que je me fais en deux mois ? Tu porterais pas toutes ses sapes et toute cette caillasse si j’avais ton vrai boulot, et ça tu l’oublies quand ça t’arranges. Mais c’est vrai, excuse moi si je suis pas un gentil petit PD qui vit de ces bouquins et de papa-maman à UCLA. » Pas de complexes. Il n’a rien à envier de cette vie qu’elle aurait aimé le voir vivre à ses côtés, dans de prestigieuses études. Les choses ne sont jamais si simples. Et particulièrement pour eux.
« Ca suffit ! » Elle se lève dans un râle, se plante face à lui une main sur la hanche et le transperce d’un regard plus noir encore que son épiderme.
« T’étais avec une pétasse ?! » Ca faisait longtemps… A peine quelques heures.
« Arrête... » souffle-t-il, las. Après près trois ans passés ensemble, elle continue à croire qu’il peut aller voir ailleurs… Il y a longtemps que ce n’est même plus envisageable dans les sentiments qu’il lui porte, envers et contre tout, y compris cette jalousie hystérique.
« Donne ton portable. » lui intime-t-elle en lui tendant la main.
« Lequel ? » Ouai… Parce qu’il en a trois. Un pour le business, un pour Sonny et un pour ses communications personnelles autrement dit, elle. Elle lui fait une moue adorable qui lui signifie que jouer au petit malin ne l’amuse pas et attend le bon, celui qu'il n’utilise exclusivement que pour elle. Le temps de plonger une main dans la poche de son baggy et de l’en sortir, il le lui donne et lui laisse tout loisir de satisfaire sa curiosité obsessive dans sa messagerie et sa liste d’appels sans un mot. Elle le referme enfin.
« Contente ? » Elle ne répond rien. Signe que non… La colère a laissée place à une sorte de confusion
« T’as très bien pu tout effacer » Ultime tentative d’avoir le dernier mot. Elle n’y croit même pas elle-même. Allez, maintenant ça s'arrête, c'est ridicule.
« Viens par là… » murmure-t-il en attrapant sa main pour l’attirer jusqu’à lui sur le canapé. Elle ne résiste qu’à moitié pour continuer faire semblant et lui faire comprendre qu’elle est fâchée. Il a bien compris… Ses cuisses chevauchent son assise l’une après l’autre alors qu’elle s’installe sur lui. Le sourire qui renait sur ses lèvres se veut communicatif et persiste à se transmettre au sien. Il lui manque.
« Tu sais que t’es la seule… » souffle-t-il doucement contre ses lèvres en y ajoutant la lecture de ses prunelles fondues dans les siennes.
« … Et que si je réponds pas, c’est que je suis occupé… Rien d’autre.. Mmm ? » ajoute-t-il sur le même timbre avant de sceller le tout dans un placide baiser auquel elle ne résiste pas avant de se faire emporter par sa charge émotionnelle et de prolonger. L’échange de leurs lèvres devient peu à peu plus languide, plus lascifs, peu à peu plus avides les unes des autres après une journée sans se trouver. Moment qu’elle choisit pour le rompre avec ses traits pleins de malice.
« Han han… Tu crois que tu peux m’avoir comme ça ? J’suis toujours fâchée tu sais. » feinte-t-elle en arquant un sourcil, sans avoir jamais su imiter un faux sérieux de façon très crédible. Cela l'amuse. Elle est craquante.
« Ouai je sais... Et t'es encore plus sexy quand t’es en pétard... » répond-t-il dans le même degré en se mordant les lèvres, laissant la balade de ses mains envahir son dos de caresses avant de se faufiler sous son haut.
« Tut Tut tut... Va falloir te rattraper avant qu’on fasse l’amour ce soir » Il s’y attèle déjà…. Son visage penché sur le côté envoie ses lèvres plonger dans le creux de son pour le recouvrir de petits baisers entrecoupés par ses souffles brulants.
« Mmm mmm… » vrombrissent ses cordes vocales enfouis dans sa nuque comme s’il était intéressée par ce qu’elle prétend et qu’il y prête une vraie-fausse attention dans ses opérations de re–conquêtes.
« D’ailleurs on ne fait plus l’amour, on baise. » Vrai. Il passe plus de temps à la décalquer comme une bête à quatre pattes en lui tirant les cheveux, que les yeux dans les yeux sur du Ben Harper... Ca a toujours été comme ça entre eux, bien avant qu’il n’ait à décharger toute l’animosité de leurs disputes à répétition, et c’est loin de la déranger aux dernières nouvelles. Une nouvelle preuve ne tarde pas à vérifier ces penchants de rapports sauvages qui font leur complicité au lit comme la tendresse presque romantique qui peut trancher avec en dehors lorsqu’elle cède, enivrée sous les entreprises plus aventures de ses gestes, de ses baisers entre deux soupires.
« Tu triches toujours.. Petit con... » souffle le sourire de ses lèvres reviennent avant de revenir happer les siennes avec une passion nourrie.